L'obligation d’achat est une mission de service public imposée à EDF et à d’autres opérateurs historiques (les entreprises locales de distribution, appelées également distributeurs non nationalisés - DNN). Elle impose à ces opérateurs d’acheter l’énergie d’un producteur lorsque ce dernier en fait la demande.
La Contribution pour le Service Public de l’Électricité (CSPE) est un mécanisme qui compense EDF et les autres opérateurs historiques pour les charges imputables aux missions de service public de l’électricité, dont l’obligation d’achat.
Un peu d’histoire…
L’électricité est un phénomène connu depuis plusieurs siècles mais ce n’est qu’au cours du XIXe siècle que nous avons appris à le maîtriser.
Afin d’alimenter les besoins des industries mais aussi des villes, les communes se sont organisées pour pouvoir produire leur propre électricité soit directement en gérant elle-même leurs moyens de production, soit indirectement en concédant la gestion à d’autres personnes.
En plus de cela elles ont dû installer les réseaux de distribution (les lignes électriques) pour apporter l’électricité produite jusque dans les foyers et les usines.
L’électricité était alors « fournie », donc vendue, aux particuliers et professionnels par des services de la commune.
Pendant toute la première moitié du XXe siècle, la France recensait des milliers de régies communales ou intercommunales qui géraient à elles seules ou en partenariat avec d’autres personnes la production, la distribution et la fourniture d’électricité.
Après la Seconde guerre mondiale, l’Etat français a souhaité nationaliser la gestion de l’électricité en créant un acteur unique sur tout le territoire national, l’établissement public Electricité de France. EDF agit depuis dans tous les domaines : la production, le transport d’électricité (haute et très haute tension = HT et THT) et la distribution d’électricité (moyenne et basse tension = MT et BT) sous le régime de la concession. En effet, les ouvrages et dispositifs techniques jusqu’aux compteurs restent le plus souvent - encore à ce jour - propriété respectivement de l’Etat (HT et THT) et des Communes ou collectivités (MT et BT).
Après guerre, beaucoup de régies ont accepté de céder leurs compétences à EDF et de disparaître, mais certaines ont fait le choix de conserver leurs compétences et de poursuivre le travail qu'elles faisaient avant la nationalisation. Ces dernières existent toujours; ce sont les Distributeurs Non Nationalisés (DNN). Aujourd’hui, on en recense 157, appelés également Entreprises locales de distribution, ELD qui exercent toujours en monopole tout ou partie des activités de production, distribution et de fourniture d’électricité sur des portions très réduites de la France, parfois ne dépassant pas le territoire d’une commune. Pour des raisons techniques, les consommateurs de ces territoires peuvent rarement changer de fournisseur.
Sur tout le reste du territoire, pendant 50 ans, EDF a géré en monopole ces trois activités (production, concessionnaire du transport et de la distribution, fourniture) jusqu’à la fin des années 90 lorsque les chefs d’Etats européens ont décidé de l’ouverture du marché de l’électricité en application d’une directive européenne de 1996.
Ainsi, en février 2000, une loi dite de « modernisation du service public de l’électricité » a permis de préparer l’ouverture du marché de l’électricité à la concurrence, avec la possibilité pour les très gros consommateurs (les premiers éligibles) de choisir un concurrent d’EDF. D’autres lois françaises ont suivi pour préparer ce tournant historique et fixer les grandes orientations de la politique énergétique du pays.
Ces étapes de libéralisation se sont poursuivies et en 2004, tous les professionnels ont pu choisir de nouveaux fournisseurs. Au 1er juillet 2007, l’ouverture dite « totale » a donné aux particuliers la possibilité d’opérer ce choix.
Dans le même temps, conformément aux Directives européennes, les activités de transport et de distribution d’électricité ont été séparées des activités de production et de fourniture. EDF a créé en son sein deux entités autonomes :
- RTE (Réseau de Transport d’Electricité) pour le transport proprement dit, c’est-à-dire les lignes et installations électriques dont la tension est supérieure ou égale à 50 000 Volts.
- ARD (Accès au Réseau de Distribution) pour la distribution, c’est-à-dire les lignes et installations inférieures à 50 000 Volts.
Lorsque EDF est devenue une société anonyme de droit privé à capitaux publics, RTE et ARD – rebaptisée pour l’occasion ERDF – en sont devenues des filiales à 100%.
Aujourd’hui, la répartition des activités au sein du groupe EDF SA se fait de la manière suivante :
- EDF produit de l’électricité, y compris renouvelable à travers trois filiales spécialisées : EDF-Energies Nouvelles, EDF-Energies-Nouvelles Réparties et EVERBA, et fournit cette électricité ;
- ERDF gère les réseaux de distribution BT et MT ;
- RTE gère le transport HT et THT.
Comment fonctionne l’obligation d’achat ?
L’obligation d’achat a été instaurée par la loi de février 2000 : EDF et les DNN sont obligés de conclure des contrats d’achat d’électricité si les producteurs intéressés en font la demande, sauf si le projet peut nuire au bon fonctionnement des réseaux.
La loi de 2000 propose une liste des moyens de production susceptibles de bénéficier du mécanisme de l’obligation d’achat et notamment les installations utilisant les énergies renouvelables (EnR). Le droit communautaire comme le droit français définissent les EnR comme étant « les énergies éolienne, solaire, géothermique, aérothermique, hydrothermique, marine et hydraulique, ainsi que l’énergie issue de la biomasse, du gaz de décharge, du gaz de stations d’épuration d’eaux usées et du biogaz ».
Aujourd’hui, au nom de la mission de service public de développement équilibré et d’approvisionnement en électricité, EDF et les DNN sont tenus de conclure des contrats d’achat d’électricité, pour une durée de 15 à 20 ans non renouvelables, avec des prix d’achat garantis fixés par arrêtés ministériels avec les producteurs qui en font la demande.
Les charges découlant de cette mission sont intégralement compensées à EDF et aux DNN par la Contribution pour le Service Public de l’Électricité (CSPE).
Qu’est ce que la CSPE ?
La Contribution pour le Service Public de l’Électricité (CSPE) est le mécanisme instauré par la loi de janvier 2003. Elle est due par tous les consommateurs d’électricité, particuliers comme professionnels et entreprises, au prorata des kWh consommés. Pour 2009, la CSPE s’élevait à 0,0045 euros par kWh consommé, soit 4,5 euros par MWh. Un ménage français « moyen » est assujetti à une CSPE d’environ 9 à 12 € par an.
Mais elle ne peut dépasser 7% du tarif de vente du kWh, hors abonnement et hors taxe, correspondant à une souscription d’une puissance de 6 kVA sans effacement ni horo-saisonnalité. Elle est également plafonnée à 500 000 euros par consommateur, donc son coût décroît pour les entreprises « électro-intensives », en partie exonérées de cette contribution à l’effort collectif au détriment des petits consommateurs qui compensent le manque à gagner.
La CSPE collectée a pour objet de compenser toutes les charges liées aux missions de service public détaillées aux paragraphes précédents:
- les coûts de production dans les zones non reliées au réseau électrique de la métropole ;
- les surcoûts résultant de la mise en oeuvre de l’obligation d’achat de l’électricité renouvelable et des tarifs associés, par la compensation entre les tarifs d’achat fixés par le gouvernement et le prix de marché de l’électricité sur le marché de gros ;
- les pertes de recettes et les coûts supportés en raison des tarifs de première nécessité ;
- les surcoûts liés aux tarifs d’achat de l’électricité produite par co-génération dans le cadre des contrats établis en 1997 à la demande du gouvernement avec un certain nombre d’opérateurs industriels.
Par exemple pour 2008 (rapport d’activité CRE 2008), la répartition des remboursements à EDF et aux DNN est la suivante (Péréquation et Dom Tom= 52%, Obligation d’Achat pour les EnR=6% , TPN et social = 4% , Cogénération= 35%).
Enfin la CSPE sert aussi à compenser les coûts supportés pour les tarifs réglementés (Tarifs réglementés transitoires d’ajustement au marché « TARTAM », appelés à disparaître dans les prochaines années) appliqués aux professionnels qui avaient quitté le tarif réglementé et à financer en partie le budget de l’institution du Médiateur de l’énergie.
La quote-part EnR de la CSPE
La compensation des surcoûts liés à l’obligation d’achat ne représentait par exemple en 2008 qu’une part marginale de la CSPE et sa variation dépend « à la hausse » de l’augmentation des quantités d’électricité renouvelable bénéficiant des tarifs d’achat et « à la baisse » de l’augmentation tendancielle du prix du marché de l’électricité sur la bourse européenne PowerNext. (le prix moyen européen dépend du mix énergétique européen, qui est corrélé aux prix des matières premières fossiles.)
Ainsi la part CSPE correspondant aux EnR pour un ménage ne dépasse pas quelques euros par an.
Quels sont les problèmes causés par ce mécanisme ?
Le problème lié à la compensation accordée via la CSPE dans le cadre du mécanisme de l’obligation d’achat est principalement de deux ordres :
Un accès à la ressource renouvelable limité pour les acteurs du marché.
EDF et les DNN étant les seuls assujettis à l’obligation d’achat d’électricité produite par des moyens utilisant des EnR, ce sont aussi les seuls à bénéficier du soutien aux producteurs de cette électricité via la compensation de la CSPE.
La très grande majorité des producteurs se tourne alors vers eux :
- soit parce qu’ils ignorent tout simplement qu’ils peuvent vendre leur production électrique à d’autres fournisseurs ;
- soit parce qu’ils préfèrent bénéficier d’un débouché réglementé par l’Etat pour leur production avec des contrats de longue durée et une rémunération élevée garantie leur permettant d’amortir leurs installations assez rapidement
À titre d’illustration, un kWh produit par un système photovoltaïque intégré au bâti est acheté sous obligation d’achat à 0,58€. Si, comme pour 2009, le prix moyen de l’électricité de gros est de 0,05€ le kWh, la compensation apportée par la CSPE sera de 0,58 – 0,05 = 0,53 € par kWh. EDF et les DNN paieront donc ce kWh 0,05 €, tandis que les autres fournisseurs devront débourser 0,58 €, auxquels s’ajouteront les coûts de gestion.
Il est donc presque impossible à un fournisseur autre qu’EDF et les DNN de se fournir sur le marché avec cette électricité 100% renouvelable, sauf à répercuter le surcoût sur ses consommateurs.
Un débouché unique pour les producteurs d’énergies renouvelables.
Nombreux sont les producteurs souhaitant vendre leur production à d’autres opérateurs qu’EDF et les DNN. Mais les fournisseurs « alternatifs », tels qu’Enercoop, ne peuvent accéder qu’à quelques demandes car le coût d’achat de cette électricité est beaucoup trop élevé. Les producteurs restent donc captifs du système instauré par la loi.
Si le mécanisme de l’obligation d’achat avec le bénéfice de la CSPE était, comme l’exigent en principe les règles d’une concurrence « loyale et non faussée », ouvert aux fournisseurs autres qu’EDF et les DNN, ce serait dans l’intérêt de tous, notamment des petits producteurs indépendants qui pourraient bénéficier d’un meilleur service de la part de leur acheteur au niveau :
- des conseils pour leur investissement ;
- des aides au financement ;
- d’une simplification des procédures d’élaboration des contrats de raccordement ;
- d’une simplification des contrats d’achat.
Ce qu’il faut retenir :
EDF et les DNN sont largement favorisés par une situation législative qui crée une distorsion de la concurrence au niveau de l’achat pour revente d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables.
Un mécanisme non conforme au droit communautaire relatif au secteur de l’énergie
A la lumière des traités européens et des directives relatives au secteur de l’énergie, il apparaît clairement que l’application actuelle du mécanisme de l’obligation d’achat et de la CSPE sont non conformes au droit communautaire.
Par rapport au droit issu du Traité d’Amsterdam instituant la Communauté européenne:
L’article 4 de ce traité pose le principe selon lequel seule une économie de marché ouverte où la concurrence est libre permet d’assurer les objectifs de la Communauté européenne. On peut en conclure que ce n’est pas le cas dans le cadre de la CSPE.
Les articles 3 et 85 posent le principe de la concurrence non faussée. C’est-à-dire qu’il faut un minimum de concurrence pour que les exigences fondamentales fixées par le traité soient respectées et que les objectifs de la Communauté soient atteints. En réalité, il n’existe pas de concurrence dans le cadre de l’achat pour revente d’électricité d’origine renouvelable.
L’article 86 prévoit que les Etats peuvent effectivement accorder des droits spéciaux ou exclusifs à certaines entreprises mais qu’ils ne peuvent maintenir des mesures contraires aux règles fixées par le Traité comme le principe de la concurrence non faussée. Ainsi, si l’Etat peut accorder un système au bénéfice de certaines entreprises comme c’est le cas pour EDF, ce système ne peut nuire à la concurrence sur le marché de l’électricité.
L’article 6 assure la promotion du développement durable et des règles liées à la protection de l’environnement.
Par rapport aux Directives portant sur l’organisation du marché de l’énergie :
Pour organiser l’ouverture des marchés de l’électricité au sein de l’Union européenne, une Directive a été adoptée le 13 juillet 2009 (Directive 2009/72/CE) fixant les règles pour que soit respecté le jeu de la concurrence sur ce marché. Elle reprend et précise les règles déjà énoncées par une directive de juin 2003 et présentées ci-dessous.
L’article 3 de cette Directive est rédigé en plusieurs paragraphes :
Paragraphe 1 : les Etats membres doivent veiller à ce que les entreprises soient exploitées dans le respect des principes posés par la Directive afin de réaliser un marché de l’électricité concurrentiel. Il interdit toute discrimination pour ce qui est de la répartition des droits et obligations de ces entreprises.
Paragraphe 2 : si les Etats membres peuvent imposer aux entreprises du secteur de l’électricité des obligations de service public pouvant porter sur la protection de l’environnement, y compris l’énergie produite à partir de sources d’énergie renouvelables. Ces obligations doivent être clairement définies, transparentes, non discriminatoires, vérifiables et garantissant aux entreprises d’électricité un égal accès aux consommateurs nationaux.
Paragraphe 6 : si une compensation financière comme la CSPE est accordée à certaines entreprises pour l’accomplissement des obligations liées à la protection de l’environnement, ce doit être d’une manière non-discriminatoire et transparente.
Ce qu’il faut retenir :
En France, la situation actuelle de la répartition des obligations de service public, notamment celle de l’obligation d’achat, avec la compensation financière de la CSPE est contraire au droit communautaire.
Le système n’est conforme ni aux Traités ni aux Directives applicables car il fixe des règles discriminatoires et fausse le jeu de la libre concurrence qui doit s’opérer sur le marché de l’électricité.
Une plainte a été déposée en juin 2006 par Enercoop et l’EREF (European Renewable Energy Federation) au titre d’un recours en manquement au droit communautaire. La plainte a été acceptée par la Commission qui a entamé des démarches auprès de l’Etat français.
Les avantages liés à l’ouverture espérée de ces mécanismes à d'autres opérateurs
Ces avantages sont nombreux et au bénéfice de tous les acteurs du marché de l’électricité.
Pour les producteurs d’électricité renouvelable.
Les producteurs bénéficieraient de débouchés variés, fournis par des fournisseurs capables de leur offrir des services innovants et de qualité, ainsi que des conseils en investissement, voire une aide au financement d’installations productrices d'énergie.
Pour les fournisseurs d’électricité.
Les fournisseurs pourraient avoir accès à plus de capacité de production exploitant des sources d’énergies renouvelables et proposer aux consommateurs qui le souhaitent une réelle offre d’électricité garantie d’origine renouvelable.
Pour les consommateurs.
Les consommateurs pourront choisir une offre d’électricité d’origine renouvelable sans avoir à payer un surcoût lié au fait que leur fournisseur ne bénéficie pas du mécanisme de la CSPE.
D’ailleurs, le mécanisme de la CSPE étant supporté par tous les consommateurs d’électricité en France, il est injuste que ceux qui veulent faire le choix d’une électricité propre et durable aient à payer à nouveau un surcoût alors qu’ils se sont déjà acquittés de la CSPE.
Pour les opérateurs historiques (EDF et les DNN).
EDF et les DNN ne seraient plus seuls à supporter le mécanisme de l’obligation d’achat ce qui leur permettrait de se décharger d’une partie de la gestion – lourde - de ce mécanisme, dont le remboursement est de plus différé dans le temps.
Pour l’Etat français.
En ouvrant l’accès au mécanisme de l’obligation d’achat et de la CSPE aux fournisseurs qui en font la demande, l’Etat créera une nouvelle dynamique qui lui permettra d’atteindre ses objectifs européens, soit les 23% d’énergies renouvelables dans la part de la consommation totale en électricité d’ici à 2020.
Les fournisseurs seront amenés à faire des offres associant la vente et l’achat d’électricité.
Les particuliers seront incités à installer leurs propres moyens de production.
Pas de surcoût pour l’Etat français ou le consommateur car:
- la compensation des fournisseurs se fera sur la base des tarifs de soutien et pour la durée arrêtée par le Gouvernement à l’identique strict du système actuel ;
- le calcul se fait sur l’écart avec le prix moyen européen, qui est tendanciellement à la hausse (à cause du mix énergétique européen à majorité fossile), la compensation de l’obligation d’achat sera donc tirée à la baisse ;
- Les investissements à réaliser pour la péréquation nationale et la précarité énergétique ont une tendance à la hausse, ce qui tend à diminuer la proportion de CSPE consacrée aux EnR ;
- le Gouvernement peut comme aujourd‘hui baisser le tarif d’achat ou la durée d’amortissement garanti lorsque les progrès dans une technologie le permettent. ;
- il n’y aura pas de coûts de gestion supplémentaires puisque le système est déjà opérationnel pour EDF et de nombreux DNN, donc de nombreux acteurs. Au contraire les coûts de gestion seront répartis sur l’ensemble des fournisseurs ;
- les consommateurs n’auront pas à payer plus que dans le système actuel car les surcoûts compensés aux acheteurs continueront à être calculés selon les mêmes modalités par l’Etat. Ce n’est pas parce qu’il y a quelques acteurs supplémentaires compensés que le consommateur paiera plus : la compensation n’est due qu’au prorata du volume d’électricité renouvelable achèté;
Pas d’enrichissement supplémentaire pour les fournisseurs ou producteurs car:
- les fournisseurs alternatifs ne s’enrichiront pas – pas plus qu’EDF et les DNN ne s’enrichissent dans ce cas - car le remboursement n’est que la différence entre le tarif d’achat garanti par l’Etat et le prix du marché européen où ils se fournissent pour leur électricité d’origine renouvelable.
- les producteurs pourront s’adresser à plusieurs fournisseurs et les mettre en concurrence pour que ces derniers leur proposent de meilleures conditions. Cependant, ils ne s’enrichiront pas plus qu’aujourd’hui car le régime de l’obligation d’achat restera celui de la loi avec des tarifs et une durée fixés par le Gouvernement.
Une complexité très relative et facile à gérer:
- le mécanisme de compensation par la CSPE est bien rôdé car il concerne plus de 150 acteurs et couvre plusieurs autres missions de service public en plus de l’obligation d’achat.
- il n’y aurait qu’une vingtaine d’acteurs supplémentaires pouvant être concernés directement par cette ouverture. Ces derniers doivent en outre faire une demande explicite pour être soumis à l’obligation d’achat.
La nécessité d’un acheteur de “dernier recours” :
- il existe déjà un fournisseur de dernier recours qui a été nommé en matière de fourniture d’électricité - EDF - pour prendre la relève en cas de défaillance du fournisseur choisi par le consommateur. Cela est tout à fait envisageable dans le cadre d’un contrat d’obligation d’achat conclu entre un producteur et un fournisseur.
- la nomination d’un acheteur de dernier recours est en conformité avec le droit communautaire qui encourage les Etats membres à désigner un opérateur de dernier recours pour assurer la continuité des obligations de service public et l’atteinte des objectifs de développement des énergies renouvelables.
La prévention des risques de fraude :
- les acteurs étant autorisés et contrôlés par la Commission de régulation de l’énergie, les risques de fraude ne sont pas plus importants dans l’activité d’acheteur obligé que dans le cadre de l’activité de fournisseur.
- la loi du 10 février 2000 et le décret d’application de la CSPE maintiennent une neutralité financière de la mission d’obligation d’achat car toute marge réalisée sur l’électricité au bénéfice de son acquéreur en raison de son origine est déduite de la compensation de la CSPE.
Proposition d'amendement de la loi NOME
Dans ce contexte, ENERCOOP, au travers de certains députés et sénateurs, a fait la proposition d'amendement suivante :
Après l’article Premier de la loi NOME :
« I : L’article 10 de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 est ainsi modifié:
1° Il est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Sous réserve de la nécessité de préserver le bon fonctionnement des réseaux, les fournisseurs d’électricité, autres qu’Electricité de France et les distributeurs non nationalisés mentionnés à l’article 23 de la loi n°46-628 du 8 avril 1946, inscrits à leur demande sur une liste tenue à cet effet par le Ministre chargé de l’énergie, sont tenus de conclure, si les producteurs en font la demande, un contrat pour l’achat de l’électricité produite à partir des installations mentionnées aux 2° et 3° du présent article. »
« Un décret en Conseil d’Etat détermine les conditions d’inscription sur la liste visée au précédent alinéa. »
« Le ministre chargé de l’énergie désigne, par une procédure transparente précisée par décret en Conseil d’Etat, un acheteur en dernier recours tenu de reprendre à son compte les contrats conclus entre un producteur et un fournisseur obligé si ce dernier est déclaré défaillant. »
2° Dans la première phrase du quinzième alinéa, les mots « Electricité de France et les distributeurs non nationalisés mentionnés à l’article 23 de la loi n°46-628 du 8 avril 1946 précitée » sont remplacés par les mots « les opérateurs concernés. »
II : L’article 5 de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 est ainsi modifié:
1° Le 1° du a) du I est ainsi rédigé :
Après les mots « ou, le cas échéant, » insérer les mots « à ceux évités aux fournisseurs d’électricité inscrits sur une liste tenue par le Ministre chargé de l’énergie ou ».
Exposé des motifs :
Electricité de France et les Distributeurs non nationalisés (DNN) sont soumis à l’obligation d’achat d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables en vertu des 2° et 3° de l’article 10 de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 et dans les conditions prescrites par cet article. Au titre de l’article 5 de la même loi, ils sont intégralement compensés par la Contribution pour le service public de l’électricité (CSPE).
En conséquence, seuls EDF et les DNN ont accès à un moindre coût aux énergies renouvelables en raison de la compensation liée à l’obligation d’achat. Les autres fournisseurs font face à deux problèmes : 1° un manque d’accès à la ressource en raison de son coût élevé sans la compensation et 2° un manque d’accès aux consommateurs en raison du coût de revente plus cher en l’absence de compensation. Les producteurs quant à eux ne disposent que d’un seul débouché pour leur production car les autres fournisseurs ne peuvent pas les intéresser pour s’approvisionner du fait d’un prix trop élevé. Enfin, les consommateurs paient deux fois : la CSPE qui vient dans tous les cas grever leur facture, et le surcoût d’achat de kWh verts lorsqu’ils s’approvisionnent chez un fournisseur non compensé.
De plus, l’application actuelle du mécanisme de l’obligation d’achat et de la CSPE sont non conformes au droit communautaire (articles 3, 4, 6, 85 et 86 du Traité d’Amsterdam et article 3 paragraphes 1, 2 et 6 de la Directive 2009/72/CE du 13 juillet 2009), car ils créent une distorsion de concurrence importante entre les opérateurs historiques (EDF et DNN) et les nouveaux opérateurs du marché de l’électricité.
Une plainte a été déposée en juin 2006 par Enercoop et l’EREF (European Renewable Energy Federation) au titre d’un recours en manquement au droit communautaire.
Comme cela a été réalisé par l’article 92 de la loi du 12 juillet 2010 dite « Grenelle 2 » pour le biogaz, cet amendement propose de rétablir l’égalité entre EDF, les DNN et les autres fournisseurs, et ce sans qu’il soit besoin de modifier les autres dispositions de la loi du 10 février 2000, notamment celles concernant la compensation par la CSPE. Ainsi, les fournisseurs qui en feraient la demande seraient inscrits sur une liste tenue par le ministre chargé de l’énergie et seraient soumis à l’obligation d’achat pour être ensuite compensés par la CSPE.
Les conditions étant exactement les mêmes que celles prescrites par le cadre législatif et réglementaire actuel, c’est-à-dire sans surcoûts pour le consommateur ou la collectivité, les producteurs et fournisseurs ne s’enrichiront pas injustement et les consommateurs ne paieront pas plus cher leur électricité qu’ils ne l’auraient payée sans cet amendement. Un acheteur de dernier recours serait désigné au cas où l’un des nouveaux fournisseurs obligés serait défaillant, ce qui constitue une contrainte moins forte que dans le cas du biogaz où cet acheteur de dernier recours est tenu de conclure un contrat si le producteur n’a pas trouvé en amont un autre acheteur.
La loi NOME, votée le 24 novembre 2010
La loi NOME, votée le 24 novembre 2010, n'a malheureusement pas intégré l'amendement proposé par ENERCOOP.
Lire ici le communiqué de presse d'ENERCOOP à ce sujet.
Pour en savoir plus, au sujet des alternatives énergétiques et des scénarios de sortie du nucléaire publiés récemment, voir notamment :
- le rapport du GIEC sur les sources d'énergie renouvelable et l'atténuation des changements climatiques, publié en 2011.
- le scénario NEGAWATT 2011, élaboré par l'association NEGAWATT et rendu public le 29 septembre 2011.
- une étude du Réseau « Sortir du nucléaire », réalisée en 2007, qui présente en détail la sortie du nucléaire en 5 ans ou en 10 ans pour la France.
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